C'est dans le courant du XVIIe siècle que le « bagel » serait sorti de l'imagination d'un boulanger polonais pour honorer Jean III Sobieski, roi de Pologne venu avec ses armées au secours de la ville de Vienne assiégée par les Turcs. Il conçut alors un petit pain qu'il perça d'un trou pour évoquer la forme des étriers du cheval royal et lui donna le nom de « bügel », étrier en allemand. Mais voilà... c'est un légende.

Et de fait, le linguiste Leo Rosten (1908-1997) recense la première mention du mot polonais « bajgiel », lui-même dérivé du yiddish « beygl » dans des sources de la communauté juive de Cracovie en 1610, qui indique que le pain était offert aux femmes ayant accouché. Le bagel a donc été inventé en Pologne et non en Autriche, contrairement à ce qu'affirme la légende.
Et son histoire ne s'arrête pas là. Elle se poursuit en se conjuguant avec celle des migrants d'Europe de l'Est débarqués en Amérique à la fin du XIXe siècle. Fuyant la misère et les pogroms*, ils ont emporté dans leurs bagages la recette de ce pain du pauvre. Très vite au Canada et aux Etats-Unis, ce petit pain troué a connu un vif succès avec quelques variantes.
Ainsi la pâte du bagel de Montréal est confectionnée à partir de farine de malt et d'oeufs, est légèrement sucrée et ébouillantée dans de l'eau adoucie au miel. Cuit ensuite au four à bois, le bagel est souple presque caoutchouteux. Quant au bagel de New York, il est confectionné à partir de farine de blé, légèrement salé et poché à l'eau adoucie à la cassonade. Cuit ensuite au four, il est plus gonflé et plus croustillant que celui de Montréal.

*pogrom : Le mot pogrom signifie « destruction, pillage ». Il est utilisé spécifiquement pour décrire les attaques, accompagnées de pillages et de massacres contre les Juifs, perpétrées par les chrétiens, sans réaction des autorités ou avec leur assentiment, entre 1881 et 1921.