BigrementBonAncien

En Europe occidentale, il existe des traités culinaires depuis le début du XIVe siècle. Leur étude révèle que contrairement à ce que l'on croit souvent, l'utilisation d'épices et de condiments acides par les cuisiniers du Moyen Age n'avait pas pour but de masquer le goût des viandes avariées. On sait en effet que les viandes étaient alors consommées beaucoup plus fraiches qu'aujourd'hui puisqu'elles étaient pour la plupart abattues le jour même de leur consommation, alors qu'à partir du XIXe siècle, on a cru nécessaire de laisser « rassir » les viandes de boucherie et « faisander » les gibiers.
L'utilisation culinaire de ces épices exotiques qui se confondait alors avec leur usage médical (à cette époque, il existait des épiciers apothicaires) étaient des denrées de luxe qui manifestaient le prestige et la puissance de ceux qui les consommaient. Les épices étaient omniprésentes dans les sauces et les plats servis à la table des riches. Le poivre était l'épice reine. Il était rare et cher au même titre que toutes ces épices venues de loin.
Au début des Temps Modernes, la conquête de la route des épices par les Européens n'a pas sensiblement abaissé leur prix à la consommation car les Portugais puis les Hollandais en ont conservés le monopole. Si les épices sont finalement devenues moins chères, c'est à partir du moment où le marché européens s'est rétrécit par suite de l'abandon de la cuisine épicée au profit des aromates indigènes tel l'ail, l'oignon, les fines herbes... dans le courant du XVIIe siècle. Depuis lors, non seulement la production d'épices ne s'est plus développée et quantité d'épices régulièrement utilisées au Moyen Age sont devenues introuvables en Europe.

De ce fait, j'ai donc éliminé des recettes médiévales certaines épices tel le citoual, le galanga, le mastic, le poivre long, le spic nard pratiquement introuvables sur nos marchés aujourd'hui. Par contre il était impossible d'adopter la même attitude pour ce qui concerne le verjus ou le jus de raisin vert constamment utilisé jusqu'au début de XXe siècle. Dès le Moyen Age ce condiment était au besoin remplacé dans les pays septentrionaux par du jus de pomme verte, du jus de groseille à maquereau verte ou du jus d'oseille. Dans les pays méridionaux, les gens riches avaient aussi tendance à lui substituer du jus de citron ou mieux du jus d'orange amères.
Seconde difficultés, les recettes culinaires anciennes n'indiquaient que très peu les quantités des ingrédients utilisés. Ce n'était pas gênant pour les gens de l'époque qui n'apprenaient pas la cuisine dans les livres. Il faut aussi être conscient que notre goût n'est pas le leur, j'ai donc réduit la proportion des épices utilisées alors.
Troisième difficultés. Si nous avions les mêmes goûts que les Européens des XIVe et XVe siècles, le problème d'un excès de graisse dans notre alimentation d'aujourd'hui ne se poserait pas. En effet, nos ancêtres préféraient à l'utilisation du beurre des assaisonnements aigre ou doux. Et si toutefois, ils utilisaient des graisses c'était du lard ou de l'huile qui entraient dans leurs recettes. Ceci pour dire, que les moins grasses de leurs recette ne sont pas toujours à notre goût.

Il m'a donc fallu sans cesse négocier entre l'impératif d'authenticité historique, l'impératif gastronomique et l'impératif diététique.


Date de création : 26/04/2024 08:36
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